La construction en chaux, méthode ancestrale, connaît un renouveau grâce à ses qualités écologiques et sa durabilité exceptionnelle. Des bâtiments historiques, comme les maisons en pierre du Sud de la France, témoignent de la résistance et de la beauté des murs en chaux, qui peuvent durer des siècles. Ce guide détaillé explore les techniques traditionnelles, des différents types de chaux aux méthodes de pose et d'entretien, pour vous aider à réaliser un projet de construction ou de rénovation durable et respectueux de l'environnement.
Les différents types de chaux et leurs propriétés
Le choix du type de chaux est fondamental pour la réussite de votre projet. Comprendre les propriétés de chaque variété est essentiel pour sélectionner la chaux la mieux adaptée à vos besoins et au climat de votre région.
Chaux aérienne (CL et NHL)
La chaux aérienne, issue de la cuisson de calcaire pur, se caractérise par une prise lente à l'air. Son exceptionnelle perméabilité à la vapeur d'eau favorise la régulation hygrométrique, empêchant l'apparition de moisissures et préservant la santé du bâti. Elle est idéale pour les régions au climat sec à tempéré. On distingue plusieurs types de chaux aériennes : les chaux classées CL (Chaux aérienne) selon leur teneur en CaO (oxyde de calcium), et les chaux hydrauliques naturelles NHL (Natural Hydraulic Lime), qui contiennent des argiles et possèdent une prise plus rapide.
- CL 90 : Chaux aérienne pure, avec un minimum de 90% de CaO, idéale pour les enduits et les badigeons.
- NHL 2 : Chaux hydraulique naturelle faiblement hydraulique, offrant un bon compromis entre rapidité de prise et perméabilité.
- NHL 3.5 et NHL 5 : Chaux hydrauliques naturelles plus résistantes à l'eau, adaptées aux constructions en zone humide ou soumise aux intempéries. La NHL 5 a une résistance à la compression plus élevée (jusqu'à 5 MPa) que la NHL 3.5 (environ 3.5 MPa).
Chaux hydraulique (NHL)
La chaux hydraulique, fabriquée à partir de calcaire argileux, présente une prise plus rapide que la chaux aérienne. Sa résistance à l’eau en fait un choix judicieux pour les fondations, les murs exposés à l’humidité, ou les ouvrages nécessitant une plus grande robustesse. La résistance à la compression d'une chaux NHL 5 peut atteindre 5 MPa, ce qui est significativement supérieur à celle d'une chaux aérienne.
Le choix de la chaux: un facteur déterminant
Le choix du type de chaux dépendra de plusieurs facteurs : le type de mur (pierre sèche, moellons, briques), le climat de la région, l'exposition aux intempéries, et les exigences de résistance mécanique. Un mur en pierre sèche utilisera une chaux aérienne, tandis qu’un mur de fondation en moellons nécessitera une chaux hydraulique plus robuste. Pour un mur de 10 m², on peut envisager une quantité de chaux comprise entre 500 et 1000 kg, selon l'épaisseur du mur et le type de chaux utilisée.
Techniques ancestrales de construction - étapes clés
La construction d'un mur en chaux est un art qui exige précision et savoir-faire. Chaque étape, de la préparation des matériaux à la pose des pierres, influence la qualité et la durabilité de l'ouvrage.
Préparation des matériaux
La sélection des pierres est primordiale. Pour un mur en pierre sèche, des pierres plates et régulières sont préférables, tandis que des moellons de formes irrégulières conviennent pour les murs en moellons. L'extinction de la chaux vive est une opération délicate qui demande de l'expérience et du respect des règles de sécurité. Elle consiste à ajouter progressivement de l'eau à la chaux vive, en contrôlant la température afin d'éviter une réaction excessive. Une fois éteinte, la chaux est mélangée au sable et à de l’eau pour obtenir un mortier de consistance appropriée. Le dosage idéal du mortier est de 1 volume de chaux pour 3 à 5 volumes de sable, adapté à la granulométrie.
Les différents types de murs en chaux
Plusieurs techniques ancestrales existent, chacune avec ses particularités :
- Mur en pierre sèche : Technique écologique et durable, elle ne nécessite pas de mortier. L'assemblage des pierres repose sur leur emboîtement et leur poids. Elle demande une grande maîtrise technique. Un mur de 10 mètres linéaires et 1,5 mètres de hauteur nécessitera environ 3 à 5 m³ de pierres.
- Mur en moellons : Les moellons, pierres de taille irrégulière, sont assemblés avec un mortier de chaux. Différentes techniques de pose existent : à joints plats, à joints creux, avec ou sans armature en bois (pan de bois). Un mur de moellons de 10 m² et 20 cm d'épaisseur demande environ 1 à 1,5 m³ de moellons.
- Mur en briques de terre crue : Les briques, fabriquées à partir de terre crue et séchées au soleil, sont liées par un mortier de chaux. Cette technique offre une isolation thermique et acoustique performante. La production de 1000 briques nécessite environ 10m³ de terre.
Techniques de pose et mise en œuvre
La pose des pierres exige précision et patience. Les joints doivent être réguliers et bien remplis de mortier. Le "parcheminage", consistant à appliquer une fine couche de lait de chaux sur les pierres avant la pose, améliore l'adhérence du mortier. Le "tissage" des pierres consiste à imbriquer les pierres pour une plus grande solidité. L’épaisseur des joints est en général comprise entre 1 et 2 cm, selon la taille des pierres et le type de mortier. L'utilisation d'un niveau est essentielle pour garantir la verticalité et l'aplomb du mur.
Outils traditionnels
Les outils traditionnels, simples et efficaces, restent pertinents : la truelle, le niveau à bulle, le maillet, le pic, la règle et le cordeau à tracer. Maîtriser ces outils assure la qualité de la construction.
L'entretien et la restauration des murs en chaux
Un entretien préventif régulier est essentiel pour préserver l'état des murs en chaux. Il permet d’éviter les pathologies et de garantir la longévité de l’ouvrage.
Diagnostic des pathologies
L'apparition de fissures, d'effritements, de tâches d'humidité ou de végétation nécessite une inspection minutieuse pour identifier l'origine du problème. Des fissures fines peuvent indiquer un retrait du mortier, tandis que des effritements signalent une dégradation du matériau ou un problème d'humidité. Des infiltrations d'eau peuvent endommager le mur sur le long terme.
Techniques de réparation
Les techniques de réparation sont spécifiques à chaque type de dommage. Le nettoyage du mur, le rejointoiement avec un mortier adapté, la consolidation des zones fragilisées, et l'application d'enduits traditionnels à la chaux sont des méthodes courantes. L'utilisation de produits naturels et respectueux de l'environnement est recommandée. Pour un mur de 10 m², le rejointoiement peut nécessiter de 50 à 100 kg de mortier de chaux selon l’état du mur.
La chaux dans la construction contemporaine - une approche durable
La construction en chaux répond aux enjeux de la construction durable. Sa faible empreinte carbone, son recyclabilité, sa perméabilité à la vapeur d'eau, et ses propriétés thermiques en font un matériau d'avenir.
Avantages écologiques
La chaux présente un bilan carbone nettement inférieur au ciment. C'est un matériau bio-sourcé, facilement recyclable et localement disponible. Sa perméabilité à la vapeur d'eau contribue à un climat intérieur sain et régulé. Un mur en chaux de 35 cm offre une résistance thermique R de 1,7 m².K/W, soit une performance comparable à une isolation traditionnelle pour un impact environnemental largement moindre.
Innovations et matériaux
De nouvelles techniques et matériaux améliorent les performances des murs en chaux. Des coffrages innovants permettent des formes variées. L'ajout de fibres végétales au mortier renforce la résistance à la traction. La préfabrication de blocs de chaux accélère la construction tout en conservant les propriétés écologiques du matériau. Pour une rénovation, l'utilisation de la chaux permet de préserver l'authenticité du bâti tout en assurant une meilleure performance énergétique.